Est-ce la fin des remous et trahisons à l'UDPS ?
(Jean N'Saka wa N'Saka, journaliste indépendant )
Le Président national de l'UDPS, Etienne Tshisekedi reste un personnage énigmatique, impénétrable, imprévisible, visionnaire, discret, très en avance sur son temps et sur ses contemporains. Il surprend et décontenance tout le monde, les acteurs politiques nationaux autant que les diplomates occidentaux, la base et les cadres de son parti aussi bien que sa propre famille biologique. Il rebondit et déjoue des embûches de façon inattendue, alors qu'on le croyait fini, usé, déclassé, au bout de son rouleau, sans plus aucun ressort. La preuve en est que des treize fondateurs de l'UDPS de la première heure, il est resté le seul solide au poste contre vents et marées, les autres ayant tour à tour succombé aux aventures séduisantes des arcanes de la politique tournoyante du Congo-Zaïre-RDC, à l'exception de Makanda et Kanana morts en héros constants et fidèles à l'idéal du parti. L'alliance pour la sauvegarde du dialogue intercongolais (ASD), qui contraria l'accord de l'hôtel « Cascade » et contraignit ses contractants composés de la majorité à retourner à la table des négociations, portait le sceau de son génie.
La fête passée, adieu le saint ! Nul n'ignore de quelle façon il a été récompensé lors du partage du gâteau. Après son exclusion de la transition et du processus électoral à la faveur des manœuvres frustratoires délibérées, on le croyait un homme à terre qu'il fallait battre et achever par le noyautage et la destruction de son parti. Il est apparu des remous inexplicables au sein de l'UDPS, caractérisés par une rébellion ouverte d'une poignée de faux jetons, et dont la toile de fond était l'organisation des travaux préparatoires du premier congrès historique de l'UDPS depuis 26 ans d'existence. Sa signature apposée sur une série de décisions concourant à la préparation de ces travaux a été cyniquement contestée, qualifiée d'apocryphe, d'extorqué, de scannée, par un quarteron de contestataires. Une réaction inqualifiable susceptible de donner à croire qu'Etienne Tshisekedi ne jouirait plus de toutes ses facultés, qu'il n'aurait plus aucune emprise sur l'évolution des structures de son parti et leurs animateurs. Drapé dans sa tunique de sphinx, il laissait faire et dire, comme s'il ne savait ni n'entendait rien, alors qu'en réalité, rien ne lui échappait. Les analystes politiques sérieux et les observateurs avertis savaient qu'il en avait vu bien d'autres, pires que cela, et qui n'avaient pas ébranlé son moral ni contrarié la marche en avant de son parti, de la part de ses pairs fondateurs de la première heure. Joseph Ngalula, Marcel Lihau, Frédéric Kibassa, Grégoire Dikonda, Faustin Birindwa, pour ne mentionner que ces cinq ténors et cerveaux, avaient fait défection et étaient partis sans réussir à désagréger l'UDPS. Le vent de révolte interne qui soufflait en marge des préparatifs du premier congrès, pour Etienne Tshisekedi lui-même tout comme pour les analystes politiques et les observateurs bien instruits de l'histoire de l'UDPS et ses difficultés de croissance, était perçu tout simplement comme une tempête dans un verre d'eau. Propres produits de Tshisekedi qu'il a façonnés lui-même, les fomentateurs de ce vent temporairement malfaisant ne peuvent estimer avoir les reins solides autant que ces personnages de la première heure qui malgré cela, n'avaient pas réussi à désintégrer le parti. Des moyens machiavéliques Ils ont épuisé tout leur carquois de flèches empoisonnées. SMS injurieux attentatoires à la vie privée, insultes publiques proférées sans ménagement, incitation de la base à la rébellion et la propagation des mensonges au cours des matinées politiques, déformation intentionnelle du contenu des décisions du Président national, vulgarisation du refus d'acheter la carte spéciale du congrès, acharnement à dire à la base que le congrès n'aurait pas lieu. Dire partout que le Président national n'avait signé aucune décision et que sa signature aurait été extorquée. Tous les moyens machiavéliques, indécents et honteux étaient mis en œuvre pour ternir à jamais l'image de l'UDPS et la cote d'amour de son leader, aussi bien au pays qu'à l'extérieur. C'est au plus fort de cette tempête soulevée par les apprentis sorciers et contre toute attente qu'Etienne Tshisekedi rebondit et renverse la vapeur d'un coup de baguette. De Bruxelles où il se trouve, le Président national de l'UDPS fait parvenir à Kinshasa une décision jusque-là inespérée à double effet, à savoir la réhabilitation de Valentin Mubake dans ses fonctions de Président du Comité national et la restructuration du Comité organisateur du Congrès dont François-Xavier Beltchika qui était premier vice-président devient le Président attitré, tandis que Rémy Massamba, Secrétaire général, devient le Premier Vice-président. Les activités du Secrétariat national sont désormais confiées au Comité organisateur du congrès. Les autres membres de la première variante du comité organisateur restent maintenus. Le samedi 16 août, tous les membres du Comité organisateur du Congrès et le Président du Comité national se sont retrouvés ensemble à la Permanence de l'UDPS à peine rouverte après sa fermeture au mois de septembre 2007. Il y avait une affluence de militants de base et de cadres, à l'occasion de ces retrouvailles. Une ambiance bon enfant y régnait, au-delà de laquelle il fallait lire sur les visages et scruter dans les discours les sentiments des uns et des autres. Je regardais sur une chaîne de télévision samedi 16 août, tout incrédule que j'étais, fumer alternativement le calumet de la paix François-Xavier Beltchika, Valentin Mubake et Rémy Massamba, à la permanence de l'UDPS à Limete, sous les acclamations frénétiques de l'assistance béatement souriante et aux anges. Un spectacle amusant et pittoresque en apparence. Tant mieux si les lieutenants sont volontiers disposés à demeurer soudés de nouveau autour de leur commandant en chef, sans arrière-pensées ni ressentiments, après avoir reçu et assimilé sa consigne de ralliement explicitée dans la décision de réhabilitation. On est fondé à se demander si c'est la fin des remous et trahisons à l'UDPS. Ils ont prononcé chacun de petites allocutions de circonstance pour magnifier l'unité retrouvée et sceller leur indéfectible attachement à la ligne du parti. La presse, bouc émissaire Mais quelqu'un est allé trop loin dans son emphase lyrique. Il a fait une étonnante digression, reprochant à la presse d'être la semeuse de zizanie entre les cadres de l'UDPS ! L'opinion et les observateurs ne sont pas dupes quant à ce rôle de bouc émissaire attribué à la presse à la légère dans une exaltation délirante. La demande de prières diffusée dans certains journaux pour la santé du Président national de l'UDPS qui aurait été évacué en catastrophe vers l'Afrique du Sud n'était pas l'œuvre de la presse. Elle était signée dans un communiqué remis à la presse et l'identité de ses auteurs était bien connue. La contestation de la signature du Président national de l'UDPS apposée sur une série de décisions relatives aux préparatifs du Congrès n'émanait pas de la presse. Le scandale qui s'était produit à Athènes n'était pas l'œuvre de la presse, etc. D'ailleurs, c'est faire preuve d'ingratitude en faisant semblant d'ignorer le rôle joué par la presse libre et indépendante qui ne cessait de demander aux cadres de l'UDPS d'être sages et circonspects. L'attachement à l'autorité morale du Président national de l'UDPS qu'on a juré collectivement en fanfare samedi 16 août est justement celle à laquelle certains journalistes de talents exhortaient les uns et les autres à se soumettre, en leur rappelant qu'Etienne Tshisekedi lui-même avait déclaré publiquement lors du lancement de la carte spéciale du congrès, qu'il était bel et bien le signataire de toutes les décisions prises jusque-là. Accepter la réhabilitation aujourd'hui, c'est accepter aussi toutes les décisions antérieures qu'on contestait. Il n'y a pas de juste milieu. La tempête dans un verre d'eau s'est apaisée.
2008-08-25